Bérengère et Clara

Rencontre avec les créatrices d’Ysé, Bérengère Lehembre et Clara Blocman, deux filles qui réinventent la lingerie et la dédient aux petites poitrines...

Racontez-nous l’histoire d’Ysé et vos rôles. 

Bérengère : J’ai créé Ysé à la sortie de l’école. L’idée a germé d’une marque de lingerie différente, pour petite poitrine et pour se sentir féminine. Toutes les marques que l’on trouvait autour de nous étaient vraiment des marques avec une image de la femme plantureuse, dans l’hyper-séduction, l’apparence, le jeu, très relative à l’homme et moins à elle-même. Cela manquait de modernité. Je trouvais que ce n’était pas l’image de la femme contemporaine et je ne m’y retrouvais pas. J’en ai beaucoup parlé, avec Clara en particulier, on a fait nos études dans la même école. On a décidé de lancer cela toutes les deux. Nous avons créé ce qu’il nous manquait. Et de là, nous nous sommes réparti les rôles. Je m’occupe de l’aspect gestion de l’entreprise, la partie financière, la mise en place de la stratégie globale, les RH. Clara s’occupe plus particulièrement du volet production, depuis la création stylistique jusqu’à la logistique. Pour ce qui est du marketing, je m’occupe de l’aspect newsletter, du marketing analytique, du web marketing et du site internet. Clara gère le community management, l’animation de tous les réseaux sociaux, du blog et de la presse.

 

Au début de votre aventure, avez-vous fait appel à des personnes extérieures pour vous assister?

Clara : Oui, stylistes et modélistes. Techniquement, la lingerie, c’est compliqué. Ce sont des matières différentes. Du coup, on a fait appel à une styliste dès le démarrage pour nous aider sur toute la partie création, choix des matières, dessins, fiches techniques, etc. L’autre partie importante est l’intervention de la modéliste, d’autant que la valeur ajoutée d’Ysé est le fait que nous proposons des produits sans rembourrage avec des enjeux de fitting très pointus. Nous avons donc relevé le défi en nous entourant. Notre rôle au niveau de la création est plus comme celui d’un chef de produit dans une équipe marketing. Ce qui fait la différence de la marque : notre regard de vraies filles. Nous étions des clientes qui ne trouvions pas chaussures à nos pieds. C’est ce qui nous a permis de dessiner des produits qui soient mode car on s’associait à une styliste mais, en même temps, pour les vraies filles de tous les jours.


Comment fonctionnent vos collections ?

Bérengère : On a une collection intemporelle qui est la toute première qu’on ait faite, c’était vraiment la quintessence de ce que l’on avait envie de trouver. Pour cause, c’est ce qui plaît encore aujourd’hui le plus. C’est devenu notre collection permanente.

Clara : Cette première collection était constituée d’une dizaine d’ensembles. Aujourd’hui, elle est un peu plus étoffée avec 14 ensembles. A l’époque, on l’avait constituée comme une collection qui pouvait correspondre à différentes humeurs, différents moments de la journée. On avait un noir un peu plus séduction, un rose poudre un peu plus romantique, un indigo un peu plus graphique pour tous les jours. C’est devenu LA référence. Pour une cliente qui découvre la marque, c’est souvent l’un des premiers ensembles achetés. Du coup, on l’a reconduite et on la complète d’ensembles de produits saisonniers. Pour cela, on s’inspire beaucoup plus des tendances de saison au niveau des coloris, des imprimés. On a une collection Eté et une collection Hiver.


D’où vient le nom de la marque ?

Bérengère : Ysé est, à l’origine, un prénom grec qui signifie en français « belle à regarder ». En fait, l’histoire du soutien gorge montre que le premier soutien gorge a été créé en Grèce Antique. C’était un ruban qui minimisait l’aspect de la poitrine car l’androgynie était hyper moderne. On trouvait sympa pour l’histoire que le premier soutien gorge était en fait un éloge à la petite poitrine. On a voulu rendre hommage à cette histoire-là à travers le nom Ysé. C’est un nom empreint de toutes nos valeurs de féminité.

 

Comment vous différenciez-vous de la concurrence ?

Clara : Le secteur de la lingerie est très concurrentiel mais nous avons des valeurs ajoutées très fortes, différentes de nos concurrents. Cela commence déjà par le produit avec une approche de la lingerie sans rembourrage qui soit parfaitement fittée. Offrir un confort, un bien-aller parfait, c’est une philosophie qui est très différente de ce que l’on voit sur le marché où il s’agit plus d’une approche de séduction avec des formes que l’on met en avant. Nous, notre philosophie, c’est la mise en avant naturelle de la féminité. Une approche beaucoup plus intime d’une femme à une femme, quelque chose qui est beaucoup plus dans la valorisation de son corps tel qu’il est.


Comment s’est fait le choix de se lancer sur internet plutôt que d’ouvrir une boutique ?

Bérengère : C’est venu naturellement dans la mesure où internet nous permettait de nous adresser très rapidement à toutes les femmes, en France pour commencer, et rapidement même à l’étranger Plutôt que de commencer par ouvrir une boutique physique, nous avons préféré faire connaître et asseoir notre marque via notre e-shop, notre seule vitrine exploitée comme une vraie boutique avec de jolis visuels, des lookbooks qui attirent et qui donnent envie aux femmes d’acheter très simplement avec tout autant de conseils, de services, d’attention que ce que l’on pourrait trouver en vraies boutiques.

Clara : C’est clair que, en tant que marque pure player du web, c’est un défi mais on a fait du web notre avantage et notre différence par la proximité qu’évoque Bérangère. Le web offre plein d’outils qui permettent d’avoir un ton différent par rapport aux acteurs existants, d’avoir du contenu différent, aussi bien dans les mots, les images et les outils qui sont à notre disposition. Cela a été un accélérateur pour se faire connaître et se différencier par un accueil différent auprès des clients.

Bérengère : Les hommes ne sont pas en reste sur notre site. C’est vrai qu’il est difficile pour un homme d’entrer dans une boutique de lingerie sans se sentir mal à l’aise car il ne sait pas se repérer, il n’arrive pas à demander de conseils, etc. Ici, sur internet, c’est confortable et on l’accompagne car on a créé un espace dédié aux hommes sur le site qui s’appelle la Men’s Room, très simple d’usage, très interactive.


Avez-vous eu des moments de doute ?

Bérengère : Il y a toujours des moments de doute. Il n’y a pas de vie ni de projet qui n’avance sans doute. Après, je réponds en notre nom à nous deux, je pense que s’il y a un truc sur lequel on a 0 doute, c’est le produit. C’est vraiment notre valeur ajoutée, notre différence. Le produit plaît et, vraiment, il n’y a aucun doute là-dessus. Pour le reste, ce sont des petits doutes qui nourrissent le quotidien mais qui font que l’on se pose les bonnes questions pour aussi prendre du recul et mieux avancer.

 

Avec toute l’expérience que vous avez, quels conseils pourriez-vous donner à une fille qui voudrait se lancer dans l’entrepreneuriat aujourd’hui ?

Bérengère : Déjà, c’est de se lancer ! Le deuxième serait de s’entourer. On ne peut pas évoluer sans s’entourer au maximum. Nous, on a essayé de le faire à chaque étape de la vie de l’entreprise : on a fait partie d’un incubateur, maintenant, on fait partie du réseau Entreprendre. On peut échanger très simplement entre nous, entre start-upper. On est aussi beaucoup drivé par des mentors que l’on voit régulièrement et qui sont des DG d’entreprises avec de belles expériences, pas forcément sur le web, pas forcément sur le même créneau. Au contraire, ils nous nourrissent d’une expérience assez extérieure, toujours très appréciée.

Clara : C’est vrai qu’il faut toujours savoir s’entourer. C’est ce qui nous a permis de lancer l’entreprise parce qu’on n’avait pas d’expérience en production ou en stylisme, par exemple. Il a fallu au démarrage bien comprendre comment fonctionnait le métier, l’industrie textile, et en particulier l’industrie de la lingerie, s’approprier les cycles de production, comprendre les différentes compétences nécessaires pour arriver à maturation d’un produit. Tout ça ne se fait pas tout seul. Il y a forcément des personnes qui ont vécu l’expérience de ce secteur-là et de cette fonction-là.

Vous achetez en ligne?

Clara et Bérengère : Oui, énormément !


Quels sont vos sites préférés ?

Clara : Oh My Cream, Sézane, notamment. Il y a aussi Pas Chassé. Coralie, la créatrice, est partie du principe, comme nous sur la lingerie, que la chaussette peut être un accessoire de mode à part entière, et pas qu’un outil fonctionnel. Elle fait des chaussettes hyper jolies, de grande qualité, produites en France. Elle en dessine deux pour Ysé à Noël pour pouvoir associer sa chaussette fantaisie à sa lingerie. Vous les retrouverez sur notre site fin novembre.

Bérengère : Je vous recommande un site déco. C’est en fait deux mecs qui se sont lancés et ont créé Golden Age, une boutique de déco vintage. Ils chinent des meubles, des assises, tout type de déco, des cartes, des affiches dans des brocantes. Ils ont une formation de décorateurs d’intérieur. Ils retapent tout en deux temps trois mouvements. Ce sont vraiment de très jolies pièces vendues à un prix hyper accessible.


Est-ce que vous lisez des blogs ?

Clara : Oui. Si je choisis des blogs, c’est plus parce que je les trouve beaux, esthétiques et inspirants. Je suis très classique dans mes choix. Garance Doré reste une référence. Je trouve que c’est immanquable, toujours juste, beau, inspirant, neuf. Après, dans les blogs français, j’aime The Socialite Family, un super blog d’inspiration déco avec des gens de la vraie vie. Il y a aussi Manger/Mimi Thorisson, un blog de cuisine super beau.


Etes-vous particulièrement impressionnée ou inspirée par une « célébrité » du Net ? 

Clara : Pour moi, c’est Morgane de Sézane. Je trouve que c’est inédit pour notre génération car elle est 100% vraie, elle-même. C’est par ce qu’elle est et par ses intuitions qu’elle a créé un truc génial et qui parle à qui la regarde. Je trouve qu’en ça, c’est assez fascinant.

Bérengère : Idem pour moi. Morgane de Sézane illustre parfaitement cette capacité à donner de la proximité alors qu’il y a un écran. Le travail de Régis Pennel à L’Exception est par ailleurs canon. Je trouve le contenu très qualitatif, l’esprit du site très beau, la sélection très juste, l’offre produits, les créateurs choisis très cohérents.

 

Etes-vous geek ou chic ?

Clara : Je ne sais pas si je suis chic mais j’ai une sensibilité pour le beau. Je pense que, dans Ysé, c’est quelque chose qui m’anime au quotidien et qui fait qu’Ysé chaque matin me plaît. Il y a ce rapport à l’esthétique. Après, geek, on le devient par la force des choses avec Ysé mais ce n’est pas ma nature.

Bérengère : Moi, je dirais plus geek quand même. Internet regorge de mille possibilités. On apprend tous les jours de cet outil qui est incroyable et puissant. Je trouve cela hyper fascinant, ça attise la curiosité de jours en jours.

Photos: Peonies and Lux pour Nettement Chic